L’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA) vient de publier son premier rapport consolidé sur les sanctions et mesures appliquées** par les autorités nationales compétentes (ANC) au sein de l’Union européenne. Ce rapport marque un tournant en offrant une vision claire, précise et chiffrée de l’application des règles de régulation financière dans l’UE.

Un chiffre-clé : 71 millions d’euros d’amendes

En 2023, 970 sanctions administratives et mesures ont été imposées par les ANC des États membres. Le montant total des amendes administratives atteint 71 millions d’euros, un chiffre en hausse de 12 % par rapport à 2022, ce qui illustre une vigilance accrue et un renforcement des dispositifs de contrôle.

Répartition géographique et types de sanctions

Les données montrent des différences notables dans la distribution des sanctions selon les régions :

– Europe de l’Ouest : 65 % des amendes proviennent de pays comme la France (18 %), l’Allemagne (15 %) et les Pays-Bas (12 %), qui se distinguent par une politique de surveillance rigoureuse et des dispositifs de détection sophistiqués.

– Europe du Sud : L’Italie et l’Espagne concentrent à elles seules 20 % des sanctions, principalement pour des infractions liées à la manipulation de marchés.

– Europe centrale et orientale : Bien que les montants soient inférieurs (environ 5 % du total), l’ESMA note une augmentation significative de la coopération transfrontalière pour traiter les abus complexes.

Détail des principales infractions :

Manipulation de cours :

Avec 40 % des sanctions, cette catégorie concerne principalement des activités telles que :

–  Gonflement artificiel des volumes d’échange pour induire en erreur les investisseurs.

–  Diffusion de fausses informations pour influencer les cours.

– Exemple récent : Une banque espagnole a été condamnée à une amende de 3 millions d’euros pour avoir utilisé des algorithmes afin de créer une illusion de forte demande.

Utilisation d’informations privilégiées (Insider Trading) :

Cette infraction constitue 30 % des cas signalés et cible principalement :

– Les dirigeants d’entreprises ayant accès à des informations confidentielles avant des annonces majeures.

– Les partenaires externes exploitant des données internes avant des fusions/acquisitions.

– Exemple notable : En Allemagne, un conseiller financier a été sanctionné à hauteur de 1,8 million d’euros pour avoir transmis des informations privilégiées à un proche.

Non-conformité aux obligations de transparence (MiFID II) :

Représentant 20 % des sanctions, ces manquements concernent :

– Défaut de déclaration de transactions suspectes dans les délais requis.

– Mauvaise qualité des rapports de transaction, ce qui complique les contrôles.

– Exemple concret : Un intermédiaire en Italie a reçu une amende de 1,2 million d’euros pour avoir omis de signaler plus de 150 transactions anormales sur une période de 6 mois.

Une intensification des méthodes de surveillance

Le règlement sur les abus de marché (MAR) impose aux institutions financières des systèmes de détection performants. L’ESMA souligne notamment :

– La généralisation de l’IA et du machine learning pour détecter les comportements atypiques en temps réel.

– Le renforcement des audits internes dans les grandes institutions bancaires et les sociétés de gestion.

– Une coopération transfrontalière accrue, avec plus de 120 enquêtes conjointes ouvertes en 2023.